Yves Poulhazan, dans le sillage d’un ambulant de Keroman

Le 08/02/2017 à 11:25 par La Rédaction

 

Le jour glacial n’est pas levé ce mardi 10 janvier. Qu’importe pour les habitués qui se pressent dès 8 heures devant la remorque illuminée d’Yves Poulhazan, au centre de Moëlan-sur-Mer. Jusqu’à midi, un flot ininterrompu de plus d’une centaine d’inconditionnels dévalisera l’étal éclatant de fraîcheur : merlu, sole, lieu jaune, saint-pierre, encornet, merlan, langoustine… Le poisson est choisi entier, et préparé par le poissonnier ambulant, toujours de bonne humeur, aussi à l’aise dans le filetage que dans la conversation, simultanée. Françoise Guilloux, sa compagne, le seconde déjà avec grande efficacité : elle remplace depuis peu Jeannot, le fidèle salarié, retraité.

Quatre nuits par semaine, le Quimperlois se lève à 3 heures pour acheter à la criée des côtiers de Keroman et compléter chez un mareyeur avec quelques beaux filets d’espèces industrielles (lingue, sabre) et aquacoles (saumon Label rouge et crevettes bio). La tournée des six marchés, tous à proximité de Lorient, s’achève le dimanche à Ploemeur, sa ville natale. Cinq semaines de vacances s’intercalent toutefois dans ce rythme très soutenu.

Réfractaire à l’école, Yves, apprenti boulanger, embarque à 17 ans avec son père marin pêcheur. Cette décennie en mer a forgé sa connaissance parfaite du poisson et des crustacés. Père de famille, il bifurque vers la poissonnerie en 1990, après une formation au Cefip, du groupe Intermarché. Sa carrière dans la grande distribution sera brève, il s’ennuie, mais a appris la gestion. Par contre, dès ses premiers extras le dimanche, il adore l’ambiance si particulière des marchés de la région, très dynamiques.

Et le chef de rayon devient ouvrier poissonnier salarié d’ambulants avant de saisir une opportunité : la reprise de l’affaire de son second patron. Aquar’Yves naît en 2010. L’entreprise est récente, mais Yves sert avec bonheur sa clientèle depuis plus de 20 ans, sur les mêmes marchés. L’emprunt pour le rachat était raisonnable. Ce modèle économique basé sur la proximité de la criée et des marchés est modeste mais éprouvé : taux de casse très faible, marge brute suffisante, au prix cependant d’un travail hebdomadaire de plus de 60 heures pour cet homme tranquille de 52 ans, unanimement apprécié par ses pairs. La pêche française vit, en partie, de ces petites fourmis obiles laborieuses, irremplaçables.

Texte et photo : Lionel FLAGEUL

 

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