4 QUESTIONS À JEAN-JACQUES CADORET, OSTRÉICULTEUR

Le 18/02/2014 à 14:55 par La Rédaction

Installé à Riec-sur-Belon, dans le Finistère, l’ostréiculteur doit, comme ses confrères, faire face au problème de mortalité qui touche les juvéniles et les huîtres adultes. Et alors que ses coûts de production s’élèvent logiquement, Jean-Jacques Cadoret mise sur le grand export pour trouver des marchés capables d’assurer des marges à son entreprise.

1. Les surmortalités de juvéniles ne faiblissent pas depuis 2008. En 2013, pour d'autres raisons, les huîtres adultes sont aussi touchées. Comment faire face ?

2. La hausse des cours nécessaire serait de quel ordre ? Pensez-vous que les consommateurs, dans une période économique difficile, puissent suivre ?

3. Les marchés de l’export sont-ils plus rémunérateurs que ceux de l’Hexagone ?

4. Trouver des relais de croissance dans la production d’autres coquillages ou en développant des activités vous permettant de capter plus de valeur ajoutée, comme avec l’ouverture de corners, vous y pensez ?

 

INTERVIEW

Question 1. Les surmortalités de juvéniles ne faiblissent pas depuis 2008. En 2013, pour d'autres raisons, les huîtres adultes sont aussi touchées. Comment faire face ?

Malheureusement, la surmortalité chez les huîtres adultes n’est pas un phénomène nouveau. Dans la rivière du Belon, où nos spéciales doivent séjourner 6 mois pour obtenir cette appellation, les taux de mortalité peuvent atteindre 80 %. Or, si nous savons d’où vient le mal, les remèdes restent mystérieux. Les mortalités surviennent sur tous les types d’huîtres et jamais au même moment.
Ces phénomènes font drastiquement grimper les coûts de production. Jusqu’à présent, les gros acheteurs avaient accepté des hausses de prix pour nous aider, mais, en 2013, beaucoup demandent des baisses. La pression est forte alors qu’il nous faudrait des hausses de prix. Je crains que les prix de gros et d’expédition ne nous assurent plus les marges qui nous permettent de durer et d’investir dans la matière première.

Question 2. La hausse des cours nécessaire serait de quel ordre ? Pensez-vous que les consommateurs, dans une période économique difficile, puissent suivre ?

La hausse des cours nécessaire est toujours difficile à estimer puisqu’une variation de 10 % sur les mortalités peut changer la donne. Les consommateurs peuvent-ils suivre ? Jusqu’à présent, les quantités vendues à Noël sont restées les mêmes avec des prix qui ont doublé. Mais l’activité s’est véritablement concentrée sur cette période, comme ce fut longtemps le cas. Dans les grandes surfaces comme chez les poissonneries, c’est seulement à Noël que l’on peut désormais trouver des huîtres. La logique de mise en avant du produit le reste de l’année est rompue.
Il est d’ailleurs quasi impossible de trouver des huîtres en dehors de cette période. Notre entreprise, atypique dans la conchyliculture, réalise seulement 27 % de son chiffre d’affaires à Noël grâce au développement de l’export, moins saisonnier. Une de nos difficultés consiste à conserver des huîtres pour assurer l’emploi des 50 salariés de l’entreprise le reste de l’année. Pour y parvenir, je profite de cette période d’avant Noël pour acheter en négoce à des confrères 500 tonnes d’huîtres que je conserverai dans mes parcs 6 à 8 mois.]

Question 3. Les marchés de l’export sont-ils plus rémunérateurs que ceux de l’Hexagone ?

Au grand export, oui. Pour les marchés proches de la France, non. Lorsque les barrières à l’entrée sont faibles, parce que la langue et la monnaie sont les mêmes, il n’est pas possible de vendre beaucoup plus cher. Au grand export, organiser la logistique d’un produit fragile et dénicher les marchés nécessitent des investissements qui permettent de demander des prix plus élevés, qui nous permettent de continuer à investir. Mais cela demande du temps, il faut prendre des assurances… Aujourd’hui, nous récoltons les fruits d’une stratégie initiée 15 ou 20 ans plus tôt.
En réalité, à l’export, c’est un peu comme en France : plus c’est difficile plus c’est rémunérateur. Ainsi, la grande distribution est un circuit qui rémunère mieux les producteurs que ceux de la restauration. Tout le monde ne peut pas répondre aux exigences des cahiers des charges ni aux besoins, en termes de volumes, des grandes et moyennes surfaces. Ce d’autant plus que les enseignes se positionnent sur des produits de plus en plus qualitatifs. En restauration, la concurrence est plus vive. Naturellement, il est plus difficile de faire accepter les hausses. Très logiquement, développer le grand export fait partie de mes priorités pour 2014, quitte à abandonner certains marchés français.

Question 4. Trouver des relais de croissance dans la production d’autres coquillages ou en développant des activités vous permettant de capter plus de valeur ajoutée, comme avec l’ouverture de corners, vous y pensez ?

Se diversifier peut vite devenir aléatoire. Produire des algues, des moules… est un métier aussi différent qu’ouvrir des restaurants ou des corners. Si nous devions y aller, ce serait avec un vrai concept et des partenaires. Mais ce n’est pas à l’ordre du jour, d’autant que nous avons beaucoup de clients dans la restauration. Nous ferons cap sur l’export et partout où nous aurons des marges pour investir dans nos parcs. 

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