Faire progresser la sécurité sanitaire des produits aquatiques en mettant en commun des données, telle est l’une des missions principales de la CITPPM (Confédération des industries de traitement des produits des pêches maritimes), organe technique des fédérations représentant les transformateurs de la filière.
Les entreprises de la filière ont pu en mesurer toute l’importance au cours d’une année 2024 marquée par la publication en octobre d’un rapport rédigé par l’ONG Bloom et intitulé « Du poison dans le poisson », affirmant mettre au jour un scandale de santé publique concernant le mercure. Les analyses de contaminants effectuées et/ou collectées par la CITPPM depuis 10 ans ont été un appui scientifique précieux pour la profession pour garantir que les produits mis sur le marché sont conformes à la réglementation et ne présentent pas de risque pour la santé du consommateur. Par ailleurs, la profession a souhaité être totalement transparente sur les résultats. « Cependant, ce rapport (de Bloom, NDLR), basé sur des résultats d’analyses erronés réalisées par un laboratoire non accrédité, dont la méthodologie avait des failles, a eu des conséquences très négatives pour l’industrie de la conserve, notamment de thon », relève Jean-François Feillet, président de la CITTPM et par ailleurs directeur qualité et RSE chez Maison Chancerelle.
Concernant l’histamine, la rédaction d’une note d’engagement de maîtrise du risque a été entreprise par la filière conserves, afin d’harmoniser les pratiques. Des résultats d’analyses sulfites ont également été mis en commun par le groupe crevettes et crustacés. Leur synthèse montre une hétérogénéité des lots. La CITPPM poursuit les travaux sur cet additif pour en comprendre l’origine. L’organisme participe à de nombreux projets de recherche sur Listeria monocytogenes. Ces derniers portent principalement sur la croissance de cette bactérie au comportement spécifique. L’un d’eux, Sublim, vise à détecter sa présence dans les environnements de production sans analyse directe. À noter que ce risque est de mieux en mieux maîtrisé depuis 10 ans, grâce à la microbiologie prévisionnelle et à l’enrichissement de la base de données du logiciel Symprevius avec les séries historiques des adhérents de la CITPPM.
Un autre axe de travail porte sur les bactéries Vibrio dans les crevettes. Des recherches sur leur facteurs de virulence se poursuivront en 2025. La confédération s’implique également dans des projets sur les bactéries sporulées. Non pathogènes, elles sont cependant susceptibles de favoriser le développement des odeurs dans les conserves, occasionnant des retours produits.
Outre la sécurité sanitaire, la CITPPM s’implique dans des projets concernant l’impact environnemental de la filière, en mettant à disposition de ses adhérents des connaissances sur la durabilité des espèces ou encore via des projets sur les emballages. Saumono a ainsi testé des solutions souples et recyclables pour répondre aux objectifs de la loi Agec (obligations antigaspillage). Les inventaires de cycles de vie étaient également au programme 2024 pour être intégrés dans Agribalyse, l’outil qui servira de référence pour l’affichage environnemental par les entreprises agroalimentaires.
Concernant les process, le projet Salto, qui démarre cette année, se penchera sur la congélation du thon en saumure. Dernier volet d’actions : la nutrition. La CITPPM collecte ainsi des profils nutritionnels qui viennent enrichir la table Ciqual, gérée par l’Anses. Elle a également fait réaliser un dossier sur les atouts du poisson appertisé. Le but : donner des éléments scientifiques permettant à ses adhérents d’argumenter en matière de communication.
Thon : « Un seul dépassement de seuil en huit ans. »
La CITPPM a invité Anne Lorrain, directrice de recherche en écologie trophique des organismes à l’IRD ouest (Institut de recherche pour le développement), à son assemblée générale. Au sein du laboratoire Lemar, elle étudie le fonctionnement des écosystèmes marins pour prédire leurs réponses aux changements globaux. Parmi les marqueurs environnementaux : le méthylmercure comme indicateur du milieu et/ou des migrations d’espèces. Premier enseignement de ses observations : un seul thon en huit ans (sur 3 200 données) a révélé des teneurs au-dessus des seuils réglementaires de ce polluant en déclin issu des activités humaines mais aussi volcaniques. Toutes les espèces ne sont pas logées à la même enseigne. Elle a également regardé les teneurs en fonction de la place des poissons dans la chaîne trophique et la colonne d’eau. Ces travaux n’ont pas été conduits à travers le prisme de la sécurité des aliments mais peuvent permettre, à terme, d’identifier des provenances un peu plus à risques.
Marielle MARIE