En septembre, le parc des expositions de Rennes a accueilli la 39e édition du Space, salon incontournable de l’élevage. L’aquaculture y était de nouveau mise à l’honneur autour d’un parcours thématique d’exposants ainsi que d’un cycle de conférences. Un rendez-vous résolument tourné vers l’international.
Pas moins de 100 000 visiteurs de 120 pays sont venus à Rennes rencontrer 1 200 exposants, tous acteurs de l’élevage, du 16 au 18 septembre. Cette année, le Space mettait en avant la problématique de l’intelligence artificielle, qui représente une vraie révolution pour le secteur. Mais le salon proposait également un parcours dédié à l’aquaculture, « le secteur alimentaire le plus en croissance au monde » selon Paula Arriagada, Global Product Manager Aquaculture chez Huvepharma. Parmi les visiteurs qui se sont déclarés intéressés par le secteur aquacole, 20 % sont des internationaux *. Depuis 2019, il y a 20 % d’entreprises supplémentaires inscrites au parcours aquacole, atteignant le nombre de 122 exposants identifiés par un petit logo bleu avec un poisson.
La journée du 16 septembre a accueilli une des conférences dédiées à l’aliment aquacole : nouveaux ingrédients, gestion de l’impact environnemental, efficacité alimentaire, bien-être animal… Les sujets ne manquent pas ! Les intervenants ont été nombreux à rappeler le contexte dans lequel évolue l’aquaculture mondiale. En 2022, la production aquacole, qui connaît une croissance constante portée par l’Asie, a dépassé la production halieutique. D’après la FAO, d’ici 2032, l’aquaculture devrait atteindre 110,8 millions de tonnes (+ 17,4 % en 10 ans) et la pêche 93,6 millions de tonnes (+ 2,6 %). En parallèle, la population mondiale devrait se chiffrer à 9 milliards d’habitants. Ainsi, pour Stéphanie Fontagné-Dicharry, chercheuse en nutrition aquacole à l’Inrae, « l’aquaculture durable est une vraie réponse à la sécurité alimentaire mondiale ». Les intervenants ont tous souligné que les protéines marines issues de la pêche minotière pesaient moins lourd dans les aliments aquacoles, au profit des protéines végétales comme le soja. Mais cela pose d’autres problématiques : la disponibilité et la compétition d’usage pour les cultures, les impacts environnementaux et la déforestation ainsi qu’une moindre digestibilité des aliments, qui augmente le risque de rejets et de pollutions sur les sites aquacoles. Stéphanie Fontagné-Dicharry a ainsi identifié plusieurs alternatives : l’utilisation de farine d’insectes, de microalgues ou de levures pour l’apport en protéines et omégas-3 (85 % de la population mondiale est carencée), l’incorporation de levure, sélénium ou farine de krill comme ingrédient fonctionnel (anti-oxydant, résistant au stress hypotoxique…) ou encore une écoformulation qui optimise performances zootechniques et impact environnemental. Une autre voie d’amélioration de l’aliment est d’incorporer des enzymes phytases qui dégradent les protéines végétales pour faciliter leur digestibilité, une solution notamment proposée par Huvepharma. « Cela permet de réduire les pertes d’aliment, d’améliorer la nutrition des animaux et de réduire les rejets azotés et phosphatés », détaille Paula Arriagada. De son côté, la société Andritz, fabricant d’équipements d’extrusion, travaille à la flottabilité des aliments pour l’adapter à chaque espèce mais aussi à la qualité de l’eau, pour, là encore, en améliorer les performances et réduire les rejets. L’aliment est au cœur des enjeux car il s’agit de la principale source d’impact environnemental de l’aquaculture : production de matières premières, fabrication et extrusion, transport et rejets éventuels. Il s’agit également du principal coût de production, et la rentabilité de ces innovations doit être assurée pour les producteurs.
Phytosynthese primée au Space
Phytosynthese, société spécialisée en phytochimie, a été récompensée par le prix Innov’Space 2025 pour son produit Phyto AquaNity, un complément alimentaire sous forme d’huile essentielle qui renforce la défense et la robustesse des crevettes comme des poissons. Siméon Fagnon, en charge du développement aquaculture de l’entreprise, a présenté des résultats qui montrent une bonne résistance des crevettes au white spot ou du tilapia aux basses températures. Le cœur d’activité de Phytosynthese est d’identifier et sourcer des plantes riches en molécules d’intérêt, comprendre le fonctionnement de ces molécules et développer des compléments alimentaires. À ce jour, l’entreprise fournit 1 000 tonnes de produits par an, en extrayant 500 molécules de 150 plantes différentes.
Le prix Innov’Space valorise les innovations dans les filières d’élevage depuis 30 ans. Ce label apposé sur les communications du salon et sur les stands des entreprises lauréates leur apporte visibilité et reconnaissance, à l’issue du travail d’un jury de plus de 60 personnes non membres de l’organisation du salon.
Vincent SCHUMENG
*Les pays d’origine des visiteurs internationaux du parcours aquaculture : Algérie, Allemagne, Espagne, Gabon, Irak, Liban, Malaisie, Maroc, Pays-Bas, République démocratique du Congo, Royaume-Uni, Sénégal, Suisse, Taïwan, Thaïlande, Togo, Turquie