« L’idée de tanner les peaux de poisson est née devant des sushis, partagés par trois élèves de l’École supérieure de chimie organique et minérale de Compiègne », se souvient Benjamin Malatrait, qui a fondé Ictyos avec Gauthier Lefébure et Emmanuel Fourault. Ictyos est portée sur les fonts baptismaux près de Lyon, en 2018. Les premiers partenariats pour la fourniture de peaux sont noués avec des chaînes de sushis et aboutissent à une gamme de cuirs de saumon. Suivront des liens avec les producteurs de carpe de la Dombes voisine, puis de truite, d’esturgeon, de loup de l’Atlantique (bar), etc. Des essais et projets existent pour la sole, l’arapaïma ou encore le silure. « Toutes les peaux de poisson peuvent être tannées : c’est ce qui rend le métier passionnant. Le rendu est très différent d’une espèce à l’autre et, au sein de la même gamme, aucune peau ne ressemble à une autre », témoigne Benjamin Malatrait, en perpétuelle recherche de matière première.
Le procédé de transformation, « réinterprété » par Gauthier Lefébure, n’utilise pas de chrome. La première étape consiste à enlever les écailles dans un tambour rotatif. Puis les peaux sont dégraissées et blanchies, imprégnées d’un tanin extrait d’une écorce d’arbre et séchées à l’air pour obtenir le « stain » brut. Le cuir est ensuite teint puis enduit de sa couche de finition qui achèvera de définir ses propriétés (couleur, souplesse, imputrescibilité). « Sa teinte continuera à évoluer : le cuir est vivant », explique Benjamin Malatrait. Les applications sont multiples et chatoyantes (ou pas), au gré des créations pour les clients commanditaires d’Ictyos : maroquinerie de luxe, incrustation sur des chaussures, sneakers ou meubles, bijoux, bracelets de montre, boutons, menus ou tissage. « Dernièrement, nous allons vers les arts de la table et développons notre premier produit en propre – un porte-cartes (en photo) », conclut l’ingénieur.
Marielle MARIE