Quasiment un siècle jour pour jour après la fin de la grève historique des sardinières à Douarnenez, la documentariste Liza Le Tonquer a présenté son film Demain au boulot * le 8 janvier 2025, en avant-première dans le port « penn sardin ».
Pendant 52 minutes, très denses, le spectateur est plongé dans le quotidien des ouvrières de l’usine de sardines (une grande majorité de femmes ici), qui travaillent en 2 fois 8 depuis le transfert en 2015 de l’usine du centre-ville, située à proximité du port du Rosmeur, vers la zone industrielle de Lannugat. L’usine de thon (ex-Cobreco, rachetée en 2013) y est aussi installée.
Autrice d’un premier documentaire remarquable sur le travail de soignants en formation à l’hypnose à l’hôpital de Brest, avec un tournage étalé sur un an, Liza Le Tonquer a dû cette fois concentrer les prises de vue de mars à juin 2024, dont 10 jours de tournage à l’intérieur de l’usine, sur les lignes de production et pendant les pauses. Douarnenistes de mère en fille, Réunionnaises mais aussi Ivoiriennes, Malgaches, Turques… plus d’une vingtaine de nationalités mettent la sardine en boîte, débarquée en grande partie ici. Un grand nombre habitent la ZUP de Kermoysan-Penhars, à Quimper, à une vingtaine de minutes de trajet, réalisé en covoiturage.
Les interviews les plus marquantes, où la parole est la plus libre – dont celles des déléguées syndicales – se déroulent toutefois en dehors de l’usine, chez les ouvrières et au bord du chemin de randonnée qui longe le site. Une ancienne ouvrière, licenciée pour inaptitude à la suite d’opérations liées à des troubles musculosquelettiques, y livre sans doute le témoignage le plus rude.
La direction de Chancerelle, dont une dizaine de cadres dirigeants étaient présents à la première séance, n’a pas du tout apprécié cette œuvre documentaire, dont Liza Le Tonquer assume et revendique d’exposer le seul point de vue des ouvrières. Une parole rare…
Lionel FLAGEUL